dimanche 11 novembre 2018

En l'honneur des combattants de la Première Guerre Mondiale


Bon, cela fait bien longtemps que je n’ai rien publié ici : manque de temps, manque d’inspiration ou peut-être un peu de fainéantise aussi, avouons-le. Mais là, je ne pouvais pas rester silencieuse à l’approche du Centenaire de la fin de la Grande Guerre qui me touche particulièrement.

Alors, en l’honneur des soldats engagés dans ce premier conflit mondiale, d’où qu’ils viennent, qu’ils n’en soient pas sortis vivants ou qu’ils en soient revenus blessés ou indemnes, du moins physiquement, je vais vous présenter le parcours militaire de mes trois arrière-grands-pères et d'un de mes arrière-grands-pères pendant la Première Guerre mondiale, quatre humbles soldats parmi des millions et qui ont eu la chance d’en revenir.
Préparatifs de l'exposition Wool War One - Collection personnelle


Georges Ernest Deharvengt est né le 24 septembre 1876 à Montigny en Cambrésis (59) mais arrive très jeune dans le petit village de Saint-Thibault des Vignes, en Seine et Marne. C'est donc dans les fiches matricules de Coulommiers que l'on peut retrouver trace de son parcours militaire (ou grâce à son livret militaire qui par chance a été conservé dans la famille... :) ).
Il effectue ses deux ans de service militaire à partir de 1897 (il bénéficie d'une durée réduite en raison de son engagement à être instituteur pendant une période de 10 ans). Il passe dans la réserve en 1900 avec le grade de sergent. 
Le 2 aout 1914, malgré ses 38 ans, sa femme et ses trois jeunes enfants, Georges répond à l'ordre de mobilisation générale et s'engage comme volontaire pour la durée de la guerre.

Il est d'abord incorporé dans le 36ème régiment d'infanterie territoriale. Au début de l'année 1915, du fait des nombreuses pertes humaines, il est transféré, comme beaucoup d'autres territoriaux, dans des régiments actifs et d'abord le 276ème régiment d'infanterie.

Georges Deharvengt, assis, à gauche - Collection personnelle
Georges ne quitte alors plus les unités combattantes jusqu'à sa démobilisation le 30 décembre 1918 : il participe aux combats au sein des 129ème et 367ème régiments d'infanterie. Durant ces 4 années de guerre, il obtient ses galons d'adjudant et de sous-lieutenant puis en 1920, ceux de lieutenant.



Il est cité le 15 septembre 1915 pour avoir "brillamment secondé son chef de section par ses qualités d'énergie et de courage et a contribué efficacement à enrayer une tentative d'attaque". A cette occasion, il est décoré de la Croix de guerre "Étoile de bronze".

Le 25 avril 1916 à 19 heures, il est rendu sourd par l'explosion d'un obus alors qu'il combat à proximité de la tranchée de la sapinière, dans l'Argonne.

Sa mère décède le 12 novembre 1916 à l'âge de 64 ans tandis qu'il se trouve à Verdun. Afin de commémorer son souvenir, Georges portera un brassard noir jusqu'à la fin de la guerre. 
Il est fait chevalier de la Légion d'honneur à titre militaire le 25 juillet 1929. 

Après la guerre, il reprend son métier d'instituteur, voit la naissance de sa dernière fille en mai 1919 et conservera toute sa vie un rôle dans la vie de la Cité, notamment en devenant maire de son village.
Il meurt le 19 février 1958 chez lui, à l'âge de 81 ans.



François "Gustave" Paget est né le 3 mars 1881 dans le XIème arrondissement de Paris. Orphelin alors qu'il est âgé d'une dizaine d'années, il est recueilli par un oncle et réside donc à partir de ce moment au Vaudioux, tout petit village proche de Champagnole (39).

Gustave Paget au Tonkin - Collection personnelle

Commis ambulant aux PTT lors de son inscription sur les registres matricules de Lons le Saunier, il se porte volontaire pour le service colonial en 1903 et participe aux opérations de pacification au Tonkin entre le 1er octobre 1903 et le 17 août 1905. Un mois plus tard, il passe dans la disponibilité de l'armée active.

Trois ans de Guerre mondiale ayant déjà bien décimé l'armée française, Gustave est "remis dans le droit commun" et est affecté au 7ème bataillon du génie le 1er juin 1917, alors qu'il est déjà âgé de 36 ans et père de 2 enfants. Il combat notamment sur les terres de Champagne.

Il rejoint la 1ère compagnie de ce bataillon le 4 juin 1918 mais est blessé au combat le 18 juillet par un éclat d'obus à la poitrine et traversant l'avant bras droit.Il est alors évacué vers l'hôpital auxiliaire n°1 de Clermont-Ferrand où il reste jusqu'au 29 octobre 1918. A cette date, il retrouve ses frères d'armes pour les derniers jours de combat.


Il est démobilisé le 28 février 1919. Il retourne alors chez lui, à Paris, auprès de sa femme et de ses enfants.
Il décède chez lui, à Paris, le 5 février 1949, à l'âge de 67 ans.




Jean Antoine Thonat est né le 5 juin 1895 à Lorlanges (43). Il a donc à peine 20 ans lorsque la guerre éclate. Pourtant il est déjà orphelin de père et réside à Londres où il est maître d’hôtel (bien que sa situation professionnelle et son départ pour Londres m’intrigue, je n’ai pas encore creusé cet élément...).
Il sait lire et écrire et est incorporé à compter du 16 décembre 1914 en qualité de soldat de 2ème classe.
Il intègre le 414è RI le 15 octobre 1915 avec lequel il combat notamment sur le Plateau de Lorette et à Verdun.
À compter du 21 avril 1916, il est toujours à Verdun mais rejoint le 171e RI. 
Malheureusement, le 20 mai 1916, Jean est évacué vers l'arrière en raison d'une intoxication par les gaz. Guéri un mois plus tard, il réintègre son régiment et combat à Soissons. 
Fiche matricule de Jean Antoine Thonat - AD 43 1R 1033 vues 646 à 648
La guerre et ses privations a sans doute affaibli la santé de Jean puisqu'à partir de cette date, il alternera les séjours à l'hôpital pour maladie et le retour au front. Il combattra notamment au Chemin des Dames, dans les Vosges, en Picardie...

Après la fin de la guerre, en 1919, il est réformé temporairement en raison d'une invalidité temporaire en raison de troubles digestifs, de problèmes pulmonaires (une sclérose légère des sommets, pour les amateurs...) et divers autres faiblesses. Cette réforme sera renouvelée en 1921 et 1922. 

Le 27 avril 1921, il se marie avec Marie Léontine Fournier dans le petit village de La Chomette, voisin de son village natal. Ils s'installeront à Paris et tiendront une boutique d'articles de voyage Rue de Lyon, près de la gare de Lyon. Ils auront 3 enfants.
Jean décède à l'Hôpital Saint-Antoine à Paris le 12 mars 1972.






Jules Marie François Thiery est né le 15 aout 1870 à Buxières sous les Côtes, dans la Meuse, à 45 km de Verdun. Il est le père de mon arrière-grand-père Jean, âgé de 7 ans au début de la guerre. Il est également le père de trois autres enfants vivants en 1914.

Il a effectué son service militaire en 1890 dans les services auxiliaires pour cause de "chevauchement des deux cinquièmes orteils".

Le jour de la mobilisation générale, à 44 ans, il est rappelé à l'activité mais est finalement renvoyé dans ses foyers le 4 aout.

Le 4 février 1916, la commission de réforme le  classe à nouveau dans le service armé : il sera affecté au 6ème escadron du train des équipages, ce corps qui gère la logistique et le transport de matériel, de munitions... pour l'armée française. Il arrive au corps le 3 mars 1916.

Un peu plus d'un an plus tard, le 13 juillet 1917, il est détaché comme agriculteur le 13 juillet 1917 à Etragel, dans les Pyrénées Orientales.

Rappelé au service actif, il intègre le 10 novembre 1917 le 53ème régiment d'infanterie auprès duquel il combattra jusqu'à l'Armistice, notamment en Champagne, puis dans la Somme et enfin les Ardennes.

Il est finalement libéré définitivement de toutes ses obligations militaires le 10 décembre 1918. Il retourne alors chez lui, à Buxières, qui a subi de lourdes pertes, tant humaines que matérielles.

Il y décède le 3 mai 1949.

Les destructions à Buxerulles, petit hameau à côté de Buxières
 ****

Je ne sais rien de la façon dont ils ont vécu ce conflit, ce qu'ils ont ressenti en voyant leurs frères d'arme tomber à côté d'eux. Je ne les ai bien sûr pas connus et aucune lettre, aucun carnet n'a été conservé(e) jusqu'à nos jours, à ma connaissance.

Ce que je sais en revanche, c'est que je mesure la chance qu'ils ont eu d'en revenir vivants. 

Aujourd'hui, jour du Centenaire et depuis quelques temps, les Poilus de 14 sont dans nos esprits, font la une des médias et sur les réseaux sociaux. J'en suis absolument ravie et souhaite vraiment que cet engouement ne s'arrête pas à cette journée et que les bleuets qui ont fleuri sur les vêtements de nos politiques et nos journalistes continuent d'être fièrement arborés encore longtemps. 

Pour que vive le souvenir de mes arrière-grands-pères et celui de tous les combattants de la Première Guerre mondiale, afin que leur sacrifice n'ait pas été vain.

samedi 21 juillet 2018

Dans les pas de mes ancêtres… #RDVAncestral juillet 2018

Il y a un mois, j’étais en vacances en Bourgogne pour participer à un festival de spectacle vivant.

Après le festival, j’ai fait ma petite escapade habituelle à Vézelay. Mais pour une fois, je n’y suis pas restée la journée entière car j’avais une idée derrière la tête…

Il y a quelques temps, en effet, j’ai découvert qu’une partie de mes ancêtres maternels étaient originaires d’un tout petit village de l’Yonne, à la limite de la Nièvre, Chastellux-sur-Cure. Et il se trouve que ce village est situé à une vingtaine de kilomètres de Vézelay.

Alors, ni une ni deux, je prends la direction de cette toute petite commune de 10.5 km² et 140 habitants environ aujourd’hui et vers un haut lieu de pèlerinage pour les généalogistes, l’église et le cimetière attenant.

L’église Saint-Germain n’étant malheureusement pas ouverte, je fais seulement le tour du cimetière et prends quelques photos des tombes dont les noms me parlent. Je dois avouer que je ne suis pas très à l’aise de prendre des photos dans ce lieu tranquille et sacré, j'ai l'impression de déranger...

L'église Saint-Germain, Chastellux - Collection personnelle
L'église et l'ancien cimetière de Chastellux - Collection personnelle


Après avoir salué tous ces pauvres gens, je prends la direction indiquée par le panneau : la mairie. Bêtement, je me dit qu'elle ne doit pas être très loin.

Sauf que voilà, j'aurais dû me rendre compte que tout proche du Morvan, le village est très vallonné, les routes sinueuses et les hameaux assez éloignés les uns des autres. 

Et je me retrouve lancée sur une petite route bien escarpée, sous la chaleur écrasante du milieu d'après-midi, à me demander si mon objectif est juste après ce virage-ci ou ce virage-là.

Au bout d'une dizaine de minutes de marche,  je m'arrête sur un gros tronc d'arbre couché le long de la route, légèrement à l'ombre, pour reprendre mon souffle (les activités sportives n'ont jamais été mes matières préférées...). 

Sur le chemin de la mairie. Au loin, le hameau de La Rivière - Collection personnelle
Je réalise que je n'ai pas encore croisé âme qui vive depuis que je suis arrivée dans ce village et me laisse bercer par le calme qui règne sur ce bord de route. 

Après quelques instants, je perçois des bribes d'une conversation et distingue quelques mètres plus bas sur la route trois hommes assez pauvrement vêtus. Ils ont l'air particulièrement joyeux et l'un d'eux porte un paquet dans les bras.

Lorsqu'ils arrivent à ma hauteur, je remarque que ce que je prenais pour un paquet est en réalité un tout petit bébé bien emmailloté, comme on pouvait le faire encore il y a un siècle. 

Ils ont l'air intrigués de me voir et celui qui porte l'enfant m'interpelle : 
" - Bien le bonjour, ma p'tite dame, vous êtes perdue?" 

" - Je cherche la mairie. "

" - Ah, nous y allons justement, vous pouvez venir avec nous, j'y vais déclarer la naissance de mon premier fils Gaston! Je m'appelle Antoine Duvollet et voici mon oncle Edme Duvollet et Germain Millot, le frère de ma femme, qui m'accompagnent. "

En entendant ces mots, je comprends mieux pourquoi ils semblaient étonnés de me voir : je ne sais comment, je me retrouve en juin 1840 devant mon aïeul, Antoine, mais je suis vêtue d'un short en jeans et d'un tee-shirt et je porte mon appareil photo autour du cou. Ils doivent me prendre pour une folle échappée de l'asile ou pour une extra-terrestre! Ils n'ont peut-être pas tort après tout...

Ils ne me posent pas de question sur l'endroit d'où je viens ni la raison pour laquelle je souhaite me rendre a la mairie; aussi, je me garde bien de leur révéler les raisons de mon voyage, je ne voudrais pas les effrayer ou, encore moins, leur mentir.

Je me joins donc à eux avec joie et entame une conversation.

" - Et bien, messieurs, le moins que l'on puisse dire, c'est que ça monte chez vous! "

" - C'est qu'on est à quelques kilomètres des montagnes du Morvan. Et encore, moi, j'habite à La Rivière, et nous marchons depuis 20 minutes déjà, la plus grande partie en descente. Il faudra bien les remonter au retour. Ça va, nous sommes encore jeunes, j'ai 26 ans et Edme 47 ans. Mais pour mon père, avec qui nous vivons ma femme et moi, le chemin commence à devenir difficile."

" - Je me doute (je me garde bien de leur dire que j'y suis passée en voiture il y a un peu plus d'une heure...) et je me disais qu'en hiver, il doit être bien compliqué d'aller chercher le maire si besoin."

" - Oui, d'ailleurs en janvier 1838, j'ai dû aller déclarer la naissance de ma fille Charlotte. Il avait neigé la veille et la route était verglacée. Il nous a fallu une matinée pour y aller et revenir. Le petit étang que vous voyez là était gelé. J'ai eu peur pour ma petite fille mais le voyage s'est déroulé sans encombre. Et, s'il y a une urgence, le maire n'habite pas à la mairie, vous savez,  il habite un peu plus bas, vers l'église. "

Collection particulière

En disant cela, Antoine me regarde goguenard et je me rends compte qu'il se moque un peu de moi...
" - Et vous, mademoiselle, que faites vous toute seule dans notre petit village ? "

" - Oh, je voyage. Je rejoins ma tante qui habite dans un village un peu plus loin et je suis originaire d'une petite ville près de Paris." Voilà, ce n'est pas tout à fait la vérité mais il n'y a aucun mensonge dans ce que je viens d'énoncer.

" - Ah Paris! Je serai sans doute contraint de m'y rendre bientôt. Je suis manouvrier et le travail se fait de plus en plus rare. Avec la famille qui s'agrandit, ma femme et moi avons besoin d'argent et ce n'est pas ici que nous en trouverons. Il paraît qu'à Paris, il suffit de se baisser pour trouver un emploi, à condition d'être courageux et travailleur. "

Avant que j'aie pu lui répondre et le mettre un peu en garde, il me lance : " Nous y sommes! Voici donc la mairie de Chastellux! "

Je me tourne vers la gauche et effectivement, la mairie est face à moi, a l'écart de toute autre habitation. 

Source : Wikipedia (J'étais tellement ravie de la voir que j'ai oublié de la prendre en photo...)

Je me retourne à nouveau vers mes compagnons de voyage pour les remercier mais il n'y a plus personne. Ils ont disparu!

Je réalise alors que je n'ai fait qu'imaginer cette rencontre et que j'ai bel et bien fait le trajet seule. 

Le sourire aux lèvres, je continue ma promenade et je passe devant le monument aux morts érigé en souvenir des enfants de Chastellux morts pour la patrie puis devant le château des comtes de Chastellux, malheureusement fermé le mardi (dommage, je n'ai pas pu le visiter...)  et appartenant toujours à la famille qui l'a édifié, au XIème siècle.

En rejoignant ma voiture, je me dis que je reviendrai forcément ici, pour continuer à marcher dans les pas de mes ancêtres et qui sait, peut-être faire d'autres rencontres ancestrales...



NB : hormis la rencontre d'Antoine bien sûr, tous les éléments de ce récit sont exacts. J'ai bien croisé deux hommes avec qui j'ai discuté mais ils étaient bien de la même époque que moi, je vous rassure.  En revanche, je ne pense pas que la mairie de 1840 soit réellement celle que j'ai vue, son architecture me paraissant postérieure. Néanmoins, j'ai choisi de faire cette petite entorse à la réalité pour asseoir mon récit.

jeudi 19 avril 2018

Une carte en souvenir de ma grand-mère #Généathème avril 2018

L’un des #Généathèmes proposés par Sophie BOUDAREL pour le mois d’avril m’a fait éprouver des sentiments contradictoires : l’inspiration et le désarroi... Qui aurait cru que des cartes postales anciennes me mettraient dans un tel état?

La malle aux trésors que j’ai évoquée précédemment contient plusieurs centaines de cartes postales (sans exagération aucune), je savais donc que je trouverais facilement l’inspiration et d’ailleurs, quelques cartes me sont immédiatement revenues en mémoire à la lecture du thème proposé.

Sauf que, ce week-end, en recherchant ces cartes, je me suis plongée dans la collection constituée par mes grands-parents paternels et j’ai trouvé beaucoup d’autres histoires méritant d’être racontées !

D’où mon désarroi : trop de choix tue le choix…

J’ai tout de même réussi à réduire mon choix à deux cartes et voici la première.

Collection personnelle
  
J’ai un peu triché car cette carte n’a été adressée à personne ; en tout cas, aucun des exemplaires conservés dans la malle aux trésors (oui, il y en plusieurs...). Elle a néanmoins une grande valeur sentimentale dans la famille. 

Cette carte est donc une vue de l’entrée du village de Montjay-la-Tour, un hameau de Villevaudé, en Seine et Marne, et représente mon arrière-grand-mère paternelle, Georgette, tenant ma grand-mère, Jeanne - ma Mémée Jeannette - dans ses bras. A ses côtés, se tient son fils ainé et unique Pierre (le plus petit des deux garçons) ainsi qu’un ami de ce dernier.

Georgette et sa fille Jeanne 
(Le scan n'est pas flatteur mais je vous l'assure, ce sont bien elles!)
Je suppose que cette carte date de la fin de l’année 1911 ou du début de 1912 : ma grand-mère est née en janvier 1911 et d’après l’absence de feuilles aux arbres, la photographie a été prise en hiver.

La petite troupe a été photographiée à l’entrée du village où mon arrière-grand-père, Georges, le mari de Georgette (ils étaient prédestinés… !), a exercé le beau métier d’instituteur public pendant la plus grande partie de sa carrière. C’était donc l’un des fameux "hussards noirs de la République" et c'est l'une des raisons pour lesquelles je ressens une immense fierté d'être de sa famille!

Georgette a environ 26 ans à l'époque de cette carte postale et est mariée depuis 1903 à son Georges, de 10 ans son ainé.

Jeanne est donc son deuxième enfant après la venue au monde de Pierre quelques années auparavant.

Deux autres filles viendront par la suite : Andrée en 1913 et Suzanne en 1919. Elles ont été pour moi deux grands-mères supplémentaires et ça, c'est une joie inestimable.
Elles ne se ressemblaient ni physiquement ni dans le caractère mais elles se complétaient parfaitement. Elles étaient mes Trois Grâces et ont été, je le pense, beaucoup aimées par tous leurs proches.

Elles me manquent toutes les trois énormément.

Le seul garçon de la fratrie, Pierre, présent sur la photo, suivra la même vocation que son père et intègrera des années après lui, la même École Normale à Melun. Malheureusement, il y aurait contracté la tuberculose et meurt le jour de Noël 1930 à l'âge de 25 ans.

Depuis cette date et jusqu'à sa mort, en 1978, Georgette n'a plus porté que du noir...

Il y a quelques années, alors que nous habitions encore à quelques kilomètres de ce village, mon père et moi avions pensé avoir retrouvé l’emplacement de cette carte postale en nous rendant sur place. Mais aujourd’hui, en essayant de le resituer sur Google Maps, je n’ai pas pu me repérer. 
Dans une proximité toute relative de Paris, le village ainsi que tous ceux alentours s’est beaucoup développé en quelques années : de 585 habitants en 1911 à plus de 2 000 aujourd'hui.
Je ne suis même pas certaine que la propriété sur la carte existe toujours.

La mairie de Villevaudé - Ancienne école (Wikipedia) où Jeannette est née, dans la pièce à gauche de la porte d'entrée

Alors, amis lecteurs, si l’un de vous pense reconnaître le lieu où a été prise la photo de la carte postale, je suis preneuse de toute information…

L'histoire de la seconde carte que j'ai retenue devrait arriver dans quelques jours et aura pour sujet l'une des protagonistes de celle-ci.

jeudi 1 mars 2018

François Désiré Barbiot : quand le sort s'acharne

François Désiré Barbiot est né le 9 Pluviôse an XIII (29 janvier 1805) à Pont-Sainte-Maxence, dans l'Oise, du mariage de Jean Dominique Barbiot et Marguerite Joséphine Marie Barras, journaliers. C'est le frère de Pierre Dominique Barbiot, dont j'avais parlé lors de mon rendez-vous ancestral du mois de février et c'est mon ancêtre direct du côté maternel, mon SOSA 120.

Il se marie le 7 novembre 1826, à l'âge de 21 ans, à Pont avec une fille du village, Marguerite D'Huicque, 20 ans.

Pendant plus de 20 ans, il exerce la profession d'ouvrier mégissier, c'est-à-dire qu'il fait tomber la laine de la peau des brebis et moutons.


© D. Chatry 1997

Dans les années 1830, on compte d'ailleurs 2 tanneries et 3 mégisseries à Pont (Précis statistique sur le canton de Pont-Ste-Maxence, Louis Grave, 1834, disponible sur Google Books).

Les actes d'état civil et les recensements confirment son métier de mégissier jusqu'en 1846.

Entre cette date et 1849, il change de professions. En effet, le 20 juillet 1849, alors qu'il vient déclarer le décès de son premier fils, Alexandre Benjamin, 16 ans, François Désiré indique exercer la profession d'employé de la compagnie du chemin de fer du Nord.

La gare de Pont-Sainte-Maxence avait été ouverte deux ans plus tôt, le 21 octobre 1847, au moment de l'ouverture de la section Creil-Compiègne sur la ligne Creil-Saint-Quentin par la Compagnie des Chemins de fer du Nord. 

A cette époque, il a alors 7 enfants. On peut imaginer qu'il a voulu intégrer cette compagnie dans l'espoir de subvenir plus convenablement aux besoins de sa famille.

Cette décision ne sera sans doute pas la plus heureuse de sa vie.

En effet, on retrouve la trace de François Désiré dans un entrefilet du Journal de la ville de Saint-Quentin et de l'arrondissement daté du 28 janvier 1853. Il vient de vivre un drame.

Le 21 janvier 1853, à quelques jour de son 48ème anniversaire, il se trouve à la gare de Pont-Ste-Maxence.
Gare de Pont-Sainte-Maxence, L'arrivée du train - AD 60 cote 19 Fi 219
Et là, alors qu'il est occupé à "arranger" un wagon par l'arrière, il est écrasé par un autre wagon poussé par le vent. Écrasé entre les tampons des deux wagons, son coude droit est broyé.

La blessure est si grave que François doit alors subir l'amputation de son bras droit. Cette opération est menée par trois médecins : le médecin de la compagnie, un médecin de Pont-Sainte-Maxence et un médecin militaire.

L'article précise que l'administration du chemin de fer "toujours si bienveillante pour ses employés dans de pareilles circonstances, viendra certainement à son secours".
Journal de Saint-Quentin et de l'arrondissement, 28/01/1853, A35 N2102 - Retronews
Malheureusement, je pense que je ne trouverai pas de trace d'un quelconque secours adressé à mon arrière-arrière-arrière-arrière-grand-père puisque, sauf erreur de ma part, les archives de la compagnie conservées aux archives nationales sont postérieures à cet accident.

Et pourtant, j'espère très fortement qu'il a perçu un dédommagement suite à cet accident. D'une part, la sécurité sociale n'existant pas, je ne sais comment il a pu payer les frais médicaux. D'autre part, cette amputation a dû donner lieu à une longue convalescence et avec le seul salaire de sa femme, journalière, nourrir toute la famille devait être encore plus difficile.

François Désiré survit donc à cette opération mais ne travaillera plus jamais à la compagnie des chemins de fer du Nord; il exercera jusqu'à la fin de sa vie le pauvre métier de marchand de peaux de lapins. 
© D. Chatry 1997
Il meurt à l'âge de 75 ans le 28 juin 1880 chez lui, à Pont-Sainte-Maxence, sans être parvenu à sortir sa famille de la misère. 
 
Nota Bene : Bien que son prénom ne soit pas cité dans l'article, j'ai eu la confirmation qu'il s'agit de mon aïeul car dans les recensements postérieurs à l'accident, il est bien précisé que François est amputé du bras. Quoique selon les recensements, il est amputé du bras droit ou du bras gauche! Mais c'est bien le seul Barbiot déclaré infirme.

samedi 17 février 2018

Pauvres ancêtres - #RDVAncestral Février 2017

Le 5 mai 1832, à Pont-Sainte-Maxence, à une cinquantaine de kilomètres au Nord de Paris. Il est environ deux heures de l'après-midi.
C'est une belle journée de printemps, il fait doux, la verdure a refait son apparition, les arbres fruitiers sont en fleurs. On devrait voir des gens dehors, bien installés afin de profiter de ces premiers beaux jours après l'hiver.

Et pourtant, si je croise bien des gens dans les rues, ils ne profitent pas du beau temps pour flâner. Au contraire, on ressent une certaine agitation et une grande inquiétude dans la ville.

Et c’est bien compréhensible. 

En effet, depuis quelques semaines, l’épidémie de Choléra Morbus sévit dans la petite cité, après avoir fait des ravages à Paris et dans d’autres villes alentours. 


Aujourd'hui, j'ai choisi d'aller à la rencontre de Jean Dominique Barbiot, mon SOSA 240. C'est un jour extrêmement triste pour lui : son fils Pierre Dominique vient de mourir des suites de cette terrible épidémie à l'hospice civil de la ville, à l'âge de 37 ans. Pierre Dominique était né le 1er Brumaire an III à Pont et c'est le frère de mon SOSA 120, François Désiré Barbiot.

J'aperçois Jean Dominique sur le chemin de l'hôtel de ville alors qu'il s'apprête à y déclarer le décès.

Il est âgé de 66 ans. Il a les cheveux blancs, le dos un peu voûté et est habillé d'un costume marron assez bon marché et chaussé de sabots de bois. Après avoir exercé les métiers de tanneur et de journalier, il est aujourd'hui jardinier et vit dans une assez grande misère. Ainsi, le recensement de 1831 nous indique qu'il n'est pas soumis à aucun impôt local : ni contribution foncière, ni contribution mobilière, ni contribution des patentes ni la célèbre contribution sur les portes et fenêtres. 

Il me parait digne dans cette épreuve ; sans doute s'y était-il préparé. Pierre Dominique était malade depuis très peu de temps mais les symptômes du choléra sont si violents et impressionnants que le médecin avait préféré le faire entrer à l'hospice. En outre, à la fin du mois d'avril, il y avait déjà 19 décès liés au Choléra Morbus sur les 109 cas recensés, d'après les bulletins sanitaires publiés quotidiennement. 

Pour cette formalité, il est accompagné du garde-champêtre. En m'approchant d'un peu plus près, alors que je m'apprête à lui parler, je m'aperçois qu'ils sont en grande discussion et Jean Dominique semble tout de même en colère :

" Il parait que les gens de Paris veulent obliger tous les propriétaires à installer des latrines fermées, à paver les cours et interdire de jeter les détritus dans la rue. Moi, je comprends bien, mais comment on fait, nous qui avons déjà du mal à nourrir convenablement nos familles?
On voit bien que la plupart des malades sont des pauvres gens qui vivent dans des maisons qui tombent en ruines, dans des rues étroites jonchées d'ordures mais ils ne vivent pas là par plaisir.
" On a pourtant tout fait de ce que prescrit la Commission sanitaire : on a couché Pierre après l'avoir enveloppé dans des couvertures de laine, on a essayé de calmer ses frissons comme on a pu, on lui a faire prendre des tisanes de plantes aromatiques tous les quarts d'heure... Rien n'y a fait... Je ne comprends pas...
Avis émis par le Préfet de Seine-et-Marne le 23/08/1832 - © Blog La part de Brie
" Et je crois que les docteurs n'en savent pas beaucoup plus que nous. Ils se contentent de prescrire des infusions ou des bains de jambes. Je ne les blâme pas, je voudrais comprendre ce qui est arrivé à mon fils.
" Malheureusement, je pense que personne ne sait vraiment comment arrêter ces morts. La preuve, tu as vu, Monsieur le Curé a offert une pièce du presbytère pour y installer les malades, au cas où il n'y aurait plus de place à l'hospice...
"Et maintenant, que vont devenir sa femme et ses 4 enfants? Le plus jeune a à peine 5 ans. Ma femme et moi, on pourra peut-être les aider un peu, mais on a encore une grande fille à charge et je suis vieux et fatigué. Son frère aussi, François, sans doute également, mais lui et sa famille, eux non plus, ils ne mangent pas tous les jours à leur faim."

Je renonce à parler à Jean Dominique. Que pourrais-je lui dire ? Que la situation de sa famille va s'arranger? Je ne pense pas que ce soit vrai malheureusement. Que l'épidémie va cesser rapidement? C'est faux. Que les médecins vont trouver un remède efficace contre le choléra? Cette découverte n'interviendra que bien plus tard.

Je reste un peu désemparée face à ce père qui vient de perdre son fils. Pour un prochain rendez-vous ancestral, j'aimerais bien - enfin - croiser un ancêtre heureux...

***

L'épidémie de Choléra Morbus arrive en France en mars 1832, après avoir touché d'autres pays européens : la Russie, l'Allemagne, le Royaume-Uni. Cette épidémie touchera une grande partie de la France : de la Seine et Marne aux Bouches-du-Rhône, en passant par le Finistère, la Moselle, l'Ariège...
Le choléra fera 19 000 victimes à Paris en 6 mois, autant à Marseille. Au total, 100 000 personnes décéderont du Choléra pendant cette épidémie, entre mars et septembre-octobre 1832. Parmi les milliers de victimes anonymes, il y a eu quelques cas célèbres dont le Président du Conseil de l'époque, M. Casimir Périer, mort du choléra le 16 mai 1832 à Paris.

A Pont-Sainte-Maxence, elle fera 87 morts d'après Wikipedia. Dans le village de Pontpoint, limitrophe à Pont, l'épidémie aurait fait 300 victimes sur les 850 habitants qu'il comptait en 1831. 

Le roman Le Hussard sur le toit de Jean Giono se déroule en Provence pendant cette épidémie de 1832.

lundi 15 janvier 2018

Un prénom et ses variantes #Geneatheme Janvier 2018

Un Chrisostome, des Charlemagne, une Archange, un Appolon, un Baune, une Domitille (dont les autres prénoms sont Prudente Parfaite), des Fursy (Furcy) dont un Fursy Cléophée, une Emerentienne, un Engleberte, une Fébronie, un Florus, des Gentien, des Geoffrine, une Hombertine, un Leufroi, un Lupicin, un Onézime, un Polycarpe, un Polydore, des Renelde, une Restitude, une Scholastique, une Sébille, des Sédulie, des Servais et Servaise, un Solon, une Zélina, un Zénobe, une Zoline et une Zulmée.

Et j’en oublie sans doute, des prénoms originaux présents dans ma généalogie...

Certains reflètent la période à laquelle la naissance a eu lieu ou les opinions politiques des parents, d’autres font honneur à des saints oubliés, d’autres encore rappellent des prénoms d’origine germaniques, d’autres enfin sont totalement obscurs aujourd’hui. 

Autant dire que j’ai longuement hésité avant de choisir le prénom dont j’allais parler pour mon premier Geneatheme...

Mais finalement, j’ai décidé d’évoquer un des prénoms les plus récurrents dans ma généalogie, après les traditionnels Jean, Pierre et autres Marie. 

Celui dont je veux parler aujourd'hui est donc porté par 15 personnes dans mon arbre, dont 2 Sosas, et y existe sous 4 orthographes différentes.

Il s'agit du prénom masculin Agapit, ou Agapite, ou Agapitte ou Agapithe. Je trouve d'ailleurs ces 4 orthographes pour un seul et même ancêtre, mon sosa 160 (Génération 8). 

 
 On peut également trouver comme variantes Agapet, Agapé ou Agapi.

Agapit vient du grec Agapê signifiant amour. En espérant que ce soit de bon augure pour tous les porteurs de ce prénom dans ma généalogie...

L'origine de ce prénom viendrait d'un diacre prénommé Agapetos qui fut martyr à Rome, pendant la persécution de Valérien, d'après Geneanet. Un pape a d'ailleurs porté ce prénom entre 535 et 536.

Geneanet indique que la Saint-Agapit se fête le 6 août. Un autre site indique quant à lui que ce saint est célébré le 22 août (https://nominis.cef.fr/contenus/prenom/3155/Agapit.html).
 
Pour ma part, j'ai rencontré ce prénom uniquement dans le département du Nord et en Belgique. Et pour la plupart des occurrences, les porteurs se transmettent ce prénom de père en fils sur au moins 5 générations.


Mon premier porteur identifié est né en 1693 à Mairieux (59) et le dernier en 1858 à Bertry (59). 

Cela correspond aux données présentes dans les autres arbres sur Geneanet : 

Évolution de la fréquence du prénom Agapit (Source : Geneanet)

On peut également trouver l'évolution des prénoms Agapite et Agapithe mais globalement, le pic se situe à la même période, entre 1750 et 1800. Je ne saurais expliquer pourquoi. Et toutes ces variantes disparaissent complètement fin XIXème - début XXème. La mode est passée...

Et pour finir, un petit dicton : "Pour Saint-Agapit, si tu ne veux pas suer, enlève tes habits"!! 

Ceci est ma première participation au #Geneatheme proposé tous les mois par Sophie Boudarel de la Gazette des ancêtres

#Defi2706 : Un mariage en 115 mots

Dans le cadre du premier salon virtuel de généalogie, l’association Geneatech réunissant une communauté de généablogueurs nous la...